MARIE-EVE FORTIER
La matière première de mon travail artistique, c'est des lettres, des mots, des phrases que je trouve autour de moi ou que je rédige, un peu dans le vide. C'est des collections de vocables que j'empile les uns sur les autres, que j'entrepose, que je laisse mariner ou que j'oublie sur le plancher. Lorsque l'accumulation devient trop importante, je fais le ménage et j'en choisis quelques un avec lesquels composer. Je cherche à les matérialiser, à leur donner une existence concrète en lien ou en opposition avec le sens qu'ils portent.
Cette façon de travailler m'amène à réfléchir au langage : un objet vaporeux, mouvant, multiple, performatif, culturel, sonore, littéraire, publicitaire, un outil pour mentir, un outil pour avouer, une construction qui sert à expliquer comme à brouiller les pistes. Je crois que le langage est notre miroir (autant comme individu que comme société) et que, parfois, on s'y dévisage jusqu'à ne plus s'y reconnaître.
Je n'arrive pas à m'ancrer dans une seule discipline, préférant errer d'un médium à l'autre : installations, photomontages, sculptures, listes, dessins, vidéos, livres d'artistes, performances fictives et performances réelles. Avoir ainsi une pratique multiforme me laisse la liberté de réinventer les choses à chaque fois, ça me garde sur une corde raide d'incertitude. Toujours en apprentissage, je ne maîtrise aucun médium, à commencer par les mots avec lesquels je travaille.
Sauver les apparences no. 35, 2013
Plaisir, 2012
Cadre de porte, 2013